Welwitschia mirabilis © Francesco Tomasinelli / Biosphoto

Welwitschia mirabilis : La plante énigmatique du désert du Namib, symbole de longévité

 

Welwitschia mirabilis, souvent surnommée l'« arbre mort », l'« arbre des déserts » ou l'« arbre tumbo », est une plante étrange et fascinante, exclusivement trouvée dans les déserts côtiers de Namibie et d'Angola. Cette espèce végétale unique est considérée comme un fossile vivant en raison de son apparence primitive et de son histoire évolutive remarquable.

Histoire et description de la Welwitschia mirabilis

Le nom Welwitschia a été donné en l'honneur du botaniste autrichien Friedrich Martin Josef Welwitsch (1806-1872) qui l'a découverte en 1860. En 1862, il envoya les premiers échantillons à Joseph Dalton Hooker, directeur des jardins de Kew, qui nomma le genre en son honneur. L'épithète spécifique mirabilis signifie « admirable, merveilleux » en latin. Localement, elle est appelée Tumboa en Angola, tweeblaarkanniedood (signifiant « deux feuilles ; ne peut pas mourir ») en afrikaans, et porte divers noms dans les langues bantoues  : kharos ou khurub en Nama, nyanka en Damara, et onyanga en Herero.

Comparaison des proportions entre une Welwitschia mirabilis mâle et une femme humaine

Comparaison des proportions entre une Welwitschia mirabilis mâle et une femme humaine. | © Urs Achermann

La Welwitschia mirabilis appartient à la famille des Welwitschiaceae et est l'unique représentante de son genre. Sa caractéristique la plus distinctive est sa croissance inhabituelle, avec seulement deux feuilles larges et plates qui poussent indéfiniment à partir d'un point de croissance central à une vitesse d'un demi-millimètre par jour. Ces feuilles, d'une épaisseur d'environ 1,4 cm, peuvent atteindre une longueur impressionnante de 2 à 4 mètres et sont souvent déchirées et en lambeaux à cause des conditions climatiques extrêmes de son habitat. Ces feuilles subissent une usure considérable avec le temps car elles ne sont jamais remplacées, une caractéristique unique dans le règne végétal.

The Big Welwitschia, la plus grande Welwitschia mirabilis connue, mesure 1,40 m de haut et plus de 4 m de diamètre, âgée d'environ 1500 ans

The Big Welwitschia, la plus grande Welwitschia mirabilis connue, mesure 1,40 m de haut et plus de 4 m de diamètre, âgée d'environ 1 500 ans. | © Thomas Schoch

Bien que la Welwitschia mirabilis puisse donner l'impression d'être un arbre en raison de sa taille impressionnante et de son apparence distinctive dans les paysages arides, elle est en réalité une plante qui ne possède pas de « tronc » vertical visible, donnant l'impression qu'elle émerge directement du sol. En fait, elle possède un tronc court et épais, dérivé d’une racine pivotante de 2 à 3 mètres de profondeur, qui continue de s'élargir avec l'âge. Le plus grand tronc connu mesure 2,77 mètres de diamètre et 8,7 mètres de circonférence.

Écosystème et adaptations de la Welwitschia mirabilis dans son habitat naturel

Le désert du Namib, s'étendant le long de la côte ouest de l'Afrique australe, est le seul et unique refuge au monde de la Welwitschia mirabilis. Cette plante se trouve dans une bande côtière de 1 096 kilomètres de long, de la rivière Bentiaba en Angola à la rivière Kuiseb en Namibie, sur une largeur de 100 à 150 kilomètres où les brouillards côtiers apportent l'humidité de l'océan. Les populations de Welwitschia varient de quelques individus isolés à quelques milliers, souvent près des lits de rivières temporaires, reliant leur survie aux eaux souterraines et aux précipitations de brouillard. Originaire du Jurassique, elle s'est adaptée aux conditions arides des millions d'années écoulées.

Pour survivre dans ce milieu hostile, la Welwitschia mirabilis a développé plusieurs adaptations uniques. Ses feuilles larges et coriaces captent la rosée nocturne, source vitale d'humidité dans un environnement où l'eau est rare. Ses racines profondément enracinées lui permettent de puiser dans les réserves d'eau souterraine, assurant sa survie lors des périodes prolongées de sécheresse.

Plante mâle Welwitschia mirabilis

Plante mâle Welwitschia mirabilis. | © Tarmo Tamming

Plante femelle Welwitschia mirabilis

Plante femelle Welwitschia mirabilis. | © Richard Droker

Cette plante est cruciale pour de nombreuses espèces, fournissant humidité, nourriture et habitat. Pendant les périodes de sécheresse, des animaux comme l'oryx gazelle, le springbok, le zèbre de Hartmann et le rhinocéros noir se nourrissent de ses feuilles. L'insecte Probergrothius sexpunctatis, membre de la famille des Pyrrhocoridae, se nourrit de sa sève, de ses graines et de ses cônes, mais transporte également un champignon appelé Aspergillus niger qui infecte les cônes femelles, réduisant leur capacité à produire des graines viables. De plus, l'alouette Ammomane de Gray trouve refuge dans cette plante, tandis que des serpents tels que la vipère à corne d'Afrique du Sud, des lézards, des caméléons et divers arthropodes utilisent ses feuilles comme abri.

Cette interaction complexe entre la Welwitschia mirabilis et son environnement met en lumière sa résilience et son rôle vital dans l'écosystème fragile du désert du Namib.

Cycle de vie et conservation de la Welwitschia mirabilis

La Welwitschia mirabilis présente un cycle de vie remarquable, produisant des cônes mâles et femelles sur des individus distincts, avec une pollinisation principalement assurée par le vent. Les graines sont dispersées par les animaux et les conditions météorologiques. Cette plante à croissance lente prend des décennies voire des siècles pour atteindre sa pleine maturité. Les âges des spécimens sont déterminés par la datation au radiocarbone des échantillons prélevés au cœur de leurs racines, révélant un âge minimum de plus de 400 ans et des âges maximum dépassant 1 500 ans source . En raison de la taille imposante de certains spécimens, avec des diamètres atteignant jusqu'à 8 mètres, il est probable que ces plantes aient environ 2 000 ans.

La Welwitschia mirabilis appartient à la famille des Welwitschiaceae et est l'unique représentante de son genre

La Welwitschia mirabilis appartient à la famille des Welwitschiaceae et est l'unique représentante de son genre. | © Christian Defferrard

Malgré sa longévité exceptionnelle, la Welwitschia mirabilis est confrontée à des menaces sérieuses telles que les changements climatiques, la collecte illégale par les collectionneurs attirés par les spécimens anciens, et la perturbation de son habitat fragile par le développement de l'écotourisme et le piétinement du bétail et des véhicules tout-terrain. En conséquence, elle est classée comme une espèce vulnérable, ayant été déplacée de l'Annexe I à l'Annexe II de la CITES pour réguler la commercialisation de ses graines sans autoriser celle des plantes elles-mêmes.

La Welwitschia mirabilis est parfaitement adaptée à survivre dans l'un des environnements les plus hostiles de la planète

La Welwitschia mirabilis est parfaitement adaptée à survivre dans l'un des environnements les plus hostiles de la planète. | © Nanosanchez

Les spécimens en Angola bénéficient d'une meilleure protection comparés à ceux de Namibie, principalement en raison des mines antipersonnel laissées par les conflits passés qui découragent les intrusions humaines. En Namibie, la plante est protégée par une législation datant de 1975 et est soumise à des programmes de surveillance visant à évaluer les risques et à mettre en œuvre des stratégies de conservation efficaces pour assurer sa survie future.

La Welwitschia mirabilis reste une merveille de la nature, parfaitement adaptée à survivre dans l'un des environnements les plus hostiles de la planète. Sa résilience et sa singularité en font une espèce véritablement admirable et digne de protection.

Ressources bibliographiques :

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  • David Ward, The Biology of Deserts (Biology of Habitats Series), Oxford University Press, 2016.
  • "Rare and Endangered Plant Spotlights", United States Botanic Garden. URL , consulté le 15/06/2024.