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Feuilleter la sélectionLes Sentiers d’Anahuac – Mémoire aztèque et récit graphique de la Conquête
AUTEUR : Romain Bertrand
ILLUSTRATIONS : Jean Dytar
ÉDITEUR : Delcourt
COLLECTION : La Découverte Delcourt
DATE DE PUBLICATION : 8 octobre 2025
NOMBRE DE PAGES : 160 pages
CONTENU :
- Récit inspiré de faits historiques réels (XVIe siècle)
- Reconstitution du parcours du moine Bernardino de Sahagún et de son élève Antonio Valeriano
- Exploration de la naissance d’une conscience métisse et d’un dialogue culturel inédit
- Traitement graphique innovant mêlant gravure, codex et réalisme contemporain
- Réflexion sur la mémoire, la colonisation et la préservation du savoir autochtone
Les Sentiers d’Anahuac est une œuvre rare où se rencontrent l’érudition de l’historien et la sensibilité du dessinateur. En retraçant la collaboration, au XVIe siècle, entre le moine franciscain Bernardino de Sahagún et son élève indigène Antonio Valeriano, Romain Bertrand et Jean Dytar redonnent vie à un épisode fondateur de l’histoire mexicaine : la sauvegarde de la mémoire aztèque au cœur de la Conquête espagnole.
Une plongée historique dans le Mexique du XVIe siècle
En 1539, vingt ans après la chute de Tenochtitlan, les terres du Mexique sont profondément marquées par la domination espagnole. Tandis que les conquistadors imposent leur foi et leur langue, un homme, Bernardino de Sahagún, choisit une autre voie : comprendre avant de convertir. Entouré de jeunes indigènes éduqués au latin et aux textes bibliques, il entreprend de consigner les traditions, les croyances et les récits d’un peuple menacé d’oubli. Parmi eux, Antonio Valeriano devient le témoin privilégié d’un monde en mutation.
Ce duo improbable — le moine érudit et l’élève autochtone — porte en lui toute l’ambivalence d’une époque : entre destruction et transmission, foi et savoir, domination et reconnaissance de l’Autre. À travers leur échange, Les Sentiers d’Anahuac questionne la possibilité d’un dialogue entre deux civilisations que tout oppose.
Un récit graphique d’une richesse exceptionnelle
Jean Dytar, dont on connaît la virtuosité narrative dans Le Sourire des marionnettes et Les Illuminés, livre ici une œuvre totale. Le dessin devient langage : les scènes européennes s’inspirent de la gravure sur bois, rigides et hiératiques, tandis que les passages consacrés au monde mexica s’épanouissent dans des formes colorées empruntées aux codex précolombiens. Les deux univers se répondent, se mêlent et s’influencent, traduisant visuellement le choc et l’entrelacement des cultures.
Le scénario, rigoureux et poétique, fait alterner le roman d’apprentissage d’Antonio, les réflexions du moine sur la foi et la connaissance, et la reconstitution minutieuse de la naissance d’un document unique : l’Histoire générale des choses de la Nouvelle-Espagne, aujourd’hui considérée comme une des premières enquêtes ethnographiques du monde moderne.
Entre érudition et émotion
Loin de se réduire à un exercice documentaire, Les Sentiers d’Anahuac s’impose comme une méditation sur la mémoire, la transmission et la responsabilité des savants face à la disparition des cultures. Romain Bertrand y insuffle la rigueur de l’historien, tandis que Jean Dytar y déploie toute la puissance expressive du Neuvième Art. Le résultat est une œuvre profonde, où chaque planche témoigne d’un respect sincère pour la complexité du passé.
Cette bande dessinée s’adresse autant aux lecteurs passionnés d’histoire qu’aux amateurs de récits humanistes. Elle éclaire, sans didactisme, un moment décisif de la rencontre entre l’Europe et le Nouveau Monde, tout en rendant hommage à ceux qui, par-delà la conquête, ont cherché à sauver ce qui pouvait encore l’être : la mémoire des peuples et la beauté de leurs langues.
Référence : Les Sentiers d’Anahuac, scénario de Romain Bertrand, dessin et couleurs de Jean Dytar. Éditions Delcourt, collection La Découverte, publié le 8 octobre 2025. 160 pages, format 27,7 × 27,8 cm.



