Redman - Muddy Waters Too (chronique, review, tracklist)

Muddy Waters Too est le 9^e album studio du rappeur américain Redman, sorti le 24 septembre 2024 sur le label Gilla House.

Sorti le 24 décembre 2024, Muddy Waters Too marque le grand retour de Redman, un vétéran incontesté de la scène hip-hop de Newark, après près de neuf ans d'absence discographique. Cet album de 32 pistes, presque trois décennies après Muddy Waters (1996), témoigne de la longévité de l’artiste tout en maintenant son empreinte unique sur le genre.

L'album débute avec une intro suivie par la première chanson, "Da Fuck Goin’ On?", un morceau hardcore auto-produit de 77 secondes où Redman affiche toute sa détermination. Vient ensuite "Whut’s Hot", une collaboration avec Khrysis, qui adopte un style rap-rock revendicatif, où l’artiste aborde le refus de se laisser dicter ce qui est "hot" dans le monde du rap. "Jersey", produit par Rockwilder, propose une ambiance soul qui contraste agréablement avec l'énergie brute du morceau précédent. "Lalala", en collaboration avec Method Man, ravive cette alchimie légendaire entre les deux MCs, créant ainsi une atmosphère fidèle à leurs premières collaborations.

"Don’t You Miss" (produit par Erick Sermon) plonge dans la nostalgie des années 90, évoquant les bons souvenirs de l’époque. Ce moment est suivi par "Ignant", un egotrip percutant qui sample "Tearz" du Wu-Tang Clan, et "Aye", qui s’accompagne d'un beat funky. "Hoodstar" ajoute une touche disco à l’ensemble, tandis que "Don’t Wanna C Me Rich", le principal single de l’album, emprunte à "Luck of Lucien" de A Tribe Called Quest, témoignant d’un respect pour les classiques du passé.

L'album poursuit avec une diversité d’ambiences, explorant plusieurs facettes du rap. "I’m on Dat Bullshit" (produit par Hallway Productionz) apporte une touche trap, tandis que "Pop da Trunk" évoque une ambiance west coast distincte. "Gheddo Motivation", quant à lui, combine des éléments de gospel de rue et de trap, une fusion moderne qui reste fidèle à l’essence du rap. "Dynomite", avec Sheek Louch, rappelle que ces deux artistes n'ont rien perdu de leur énergie, tandis que "Wave" invite à se concentrer sur l’essentiel.

La collaboration avec Snoop Dogg sur "Kush" nous offre une ballade pour les amateurs de cannabis, suivie de "Booyaka Shot", un morceau qui défie les "fuckboys", affirmant qu’ils ne connaissent jamais la victoire. Sur "Goofy" (produit par Mike & Keys), Ke Turner et Redman se moquent des comportements excentriques, et "1:00" dépeint de manière humoristique le quotidien de l'emblématique "roi du cannabis". "Lite It Up", qui sample "Rapper’s Delight" de Sugarhill Gang, propose une collaboration exceptionnelle avec une pléiade d’artistes du New Jersey, dont El Da Sensei, Hakim Green, Heather B, Lady Luck, et bien d'autres.

L'album se termine sur une série de morceaux marquants : "Wudeytauknbout", "Why U Mad?" (en featuring avec Mr. Cream & Runt Dawg), "Looka Here" (avec KRS-One), et "Smoke wit Me", concluant ainsi un projet dense et varié.

Muddy Waters Too se distingue comme l'album le plus cohérent de Redman depuis Red Gone Wild: Thee Album (2007), après une longue attente de 18 ans. Avec ses 80 minutes de contenu, il représente un véritable marathon musical, à l’opposé des formats plus courts et souvent précipités qui dominent actuellement la scène hip-hop. Certes, cette durée peut paraître excessive par moments, mais l'énergie et la qualité du contenu restent impeccables tout au long du projet.

Ce nouvel opus est un véritable cadeau de Noël pour les fans de Redman : il allie nostalgie sans se laisser emprisonner par le passé, humour sans superficialité, et un contenu riche qui saura satisfaire les plus exigeants. Il est rare qu'un artiste publie une suite à son album majeur près de 30 ans plus tard, et parvienne à s'en rapprocher en termes de qualité, mais Redman a su relever ce défi avec brio. Muddy Waters Too prouve que le hip-hop est en meilleure forme que jamais.

Tracklist (liste des titres)