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Lire plusUne carte du monde représentant 1 642 espèces animales
Un monde dénué de toute trace de l’espèce humaine, où la nature règne sans partage. Telle est la conception défendue par l’artiste et cartographe néo-zélandais Anton Thomas. Nommée Wild Word (« Monde sauvage »), Thomas a consacré 3 années de travail pour réaliser cette carte, entièrement dessinée à la main.
Un amour démesuré pour la nature depuis l’enfance
Ayant passé son enfance à Nelson, une petite ville portuaire de Nouvelle-Zélande, Anton Thomas a toujours été émerveillé par les beautés de la nature, préférant de loin observer un paysage pendant des heures plutôt que de lire un livre ou de jouer aux jeux vidéo. Au cours d’un voyage effectué en Amérique du Nord de 2011 à 2012, Thomas visite la Californie (États-Unis) et remonte la côte Pacifique en direction du nord. Une fois arrivé au Canada, le néo-zélandais parcourt différentes régions du pays.
Carte de l'Amérique du Nord dessinée par Anton Thomas sur son frigo en 2012. | © Anton Thomas
Initialement, se destiner à la cartographie apparaissait peu évident pour le néo-zélandais, lui qui n’a jamais suivi la moindre formation en art. Pourtant, impossible pour Thomas de réfréner son engouement pour la géographie. Le déclic artistique survient lorsqu’en fin d’année 2012, alors que Thomas travaille comme cuisinier à Montréal. En difficulté financière, lui et son colocataire de l’époque récupèrent un vieux réfrigérateur rouillé sur le bord de la route pour leur cuisine. Son ami, déjà fan des cartes que Thomas griffonnait durant son temps libre, repeint le frigidaire en blanc et lui suggère de le décorer avec une mappemonde.
Anton Thomas a modifié sa représentation de l'Amérique du Nord sur sa carte Wild Word, axée exclusivement sur la nature. | © Anton Thomas
Le futur artiste passe ainsi six semaines devant le frigo et réalise une carte illustrée de l’Amérique du Nord, en incluant la vie humaine (noms des États américains et canadiens, gratte-ciels emblématiques des centres-villes) et les paysages (fleuves, montagnes et forêts). Mais l’idée de mettre l’accent sur la nature et de retranscrire son amour du monde sauvage germe peu à peu dans son esprit. La concrétisation de ses voeux voit le jour en juillet 2020, en plein confinement durant la pandémie de la Covid-19. Évoluant dans un espace réduit à son appartement, l’artiste y voit le signe du destin : dessiner une carte pour s’ouvrir un portail sur le monde.
Les noms des continents, des massifs montagneux et des îles sont inscrits en marron ; tandis que les noms des fleuves, lacs, baies, golfes, mers et océans apparaissent en bleu foncé. | © Anton Thomas
Une carte aux critères précis entièrement réalisée à la main
Muni d’une loupe, de crayons graphites et de crayons de couleur soigneusement aiguisés avec du papier de verre, Anton Thomas demeure soucieux du détail dès le début de son projet. Chaque élément est esquissé à la main, du relief du terrain aux toponymes en passant par l’impressionnante variété des espèces animales. Les noms des continents, des massifs montagneux et des îles sont inscrits en marron ; tandis que les noms des fleuves, lacs, baies, golfes, mers et océans apparaissent en bleu foncé. La principale caractéristique de ce planisphère est de ne faire apparaître aucune ville ni aucune frontière politique entre les différents pays du monde. En effet, il s’agit ici de mettre exclusivement en exergue la richesse de la biodiversité mondiale, répartie sur les six continents et les cinq océans de la Terre. La topographie et les biomes terrestres ne sont pas ignorés, les couleurs étant minutieusement sélectionnées afin de représenter les divers climats.
Wild World, représentations de l'Australie et la Nouvelle-Zélande. | © Anton Thomas
La principale problématique est alors de choisir judicieusement les espèces à privilégier. Après six mois de travail, le néo-zélandais commence à comprendre à quel point son projet est complexe. Thomas entreprend alors des recherches éreintantes. Selon ses propres estimations, un tiers du temps consacré à la réalisation de la carte a concerné l’étude des animaux et de la géographie physique. Il s’impose également des règles précises. Pour ce faire, trois critères primordiaux sont retenus pour la faune : ne mettre sur la carte que des animaux sauvages ; choisir des espèces indigènes à chaque région et non introduites par les migrations humaines ; les animaux dessinés doivent être encore présents dans le monde d’aujourd’hui. Ainsi, les animaux emblématiques de certaines régions de la planète mais éteints, comme le tigre de Tasmanie, ne figurent pas sur cette oeuvre.
Wild World, le bassin du fleuve Congo avec ses espèces animales emblématiques. | © Anton Thomas
Tout au long de la conception, l’artiste se trouve confronté à de multiples questions comme par exemple : le taureau de combat est-il réellement l’animal le plus emblématique de la péninsule Ibérique ? La question de la projection cartographique est également prise au sérieux. Anton Thomas a opté pour la projection naturelle de la Terre (Natural Earth projection) – projection pseudo-cylindrique centrée à 11 degrés à l’est de Greenwich – afin d'incarner son Wild World.
La biodiversité de l'océan Atlantique Nord est mise en exergue sur la carte Wild Word. | © Anton Thomas
Le 28 juillet 2023, après 3 ans et plus de 2 600 heures de travail, Anton Thomas achève sa carte du monde méticuleusement détaillée et représentant pas moins de 1 642 espèces animales.